Une vie, un métier, ne
suffisait pas à François Lelord pour combler sa soif de connaissance et pour
comprendre qui il est et, par un phénomène en miroir, qui est l’Autre. Selon
les circonstances, écrivain, voyageur, médecin, psychiatre, chercheur, il
décrypte le monde et les êtres en essayant de découvrir, derrière chaque
rencontre, le sens de l’existence. Une quête exprimée avec pudeur et
délicatesse dans chacun de ses livres. L’un des plus connus, « le voyage d’Hector ou la recherche du
bonheur », paru en 2002 et vendu à plus d’un million d’exemplaires
dans le monde, a montré son talent à se relier au cœur des Hommes. Dans ce
conte poétique moderne, Hector, jeune psychiatre, voyage de pays en pays pour découvrir,
pourquoi les êtres humains ne sont pas heureux. Cette expédition intérieure lui
fait prendre conscience que le bonheur ne se possède pas, ne s’achète
pas ; qu’il résulte d’une aptitude de l’esprit, accessible à chacun, la où
il se trouve, dans certaines conditions. Mais, ce qui était vrai hier, l’est-il
encore 12 ans après pour Hector? Il a vieilli et la crainte d’être passés,
en partie, à côté de sa vie, pointe son nez…. D’où ce dernier ouvrage : « Hector veut changer de vie »
publié chez Odile Jacob, dans lequel l’auteur se questionne sur cette fameuse « crise du milieu de vie » et sur ce qui
permet de continuer à avancer sereinement, ou, pas, quand on prend soudain
conscience, et avec force, que nous sommes mortels et que le temps nous est
compté !
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Au centre de votre
dernier livre : la crise du milieu de vie…. A quoi correspond-elle ?
La crise de
milieu de vie se situe en moyenne entre 40 et 50 ans et touche 8 à 10% de la
population. D’après la plupart des études, elle concerne davantage les hommes
que les femmes qui, pour la plupart, réévaluent naturellement, en permanence,
leur existence.
Elliot
Jacques, un psychanalyste canadien, a défini en 1965 cette crise, comme étant
le moment où l’on commence à prendre conscience que nous sommes mortels et
qu’il n’existe plus d’infini des possibles. Si ce que l’on a réalisé
jusqu’alors sur un plan personnel et/ou professionnel, ne correspond pas à nos
rêves de jeunesse, à nos désirs intimes, que l’on s’ennuie ferme dans notre
quotidien, voire que l’on est un peu déprimé, il peut y avoir crise. Certaines
personnes remettent alors tout en question, leur famille, leur travail, leurs
valeurs, pour répondre, sans attendre, à leurs besoins du moment et être
heureuses avant « qu’il ne soit trop
tard ». C’est alors très souvent radical, douloureux et perturbant
pour elles et pour leurs proches. D’autres procèdent à des modifications et réajustements
mineurs qui leur permettent de continuer leur travail, leur couple, leur vie de
famille, sans générer de trop grands bouleversements. D’autres encore, ont une liaison, puis, tout rentre
dans l’ordre. Il n’y a ni à condamner, ni à juger, mais à comprendre et à
accompagner.
Quelle attitude adopter
pour sortir sans trop de casse de cette crise
« existentielle » ? Faut-il consulter un psychiatre ? Un
thérapeute ?
Lorsqu’il y
a crise, il est fondamental de commencer par l’accepter, sans culpabiliser,
sans s’alarmer. Puis, de s’efforcer de ne pas rejeter en bloc son passé, de ne
pas en faire une lecture négative, de ne pas oublier les bons moments et les
souvenirs heureux qui ont précédés ce passage. Enfin, il convient de
relativiser sur les possibilités que nous avions, ou pas, dans notre vie
« d’avant ». En général, cette vie a été conforme aux dispositions
intellectuelles, affectives, matérielles, qui nous caractérisaient et aux
connaissances que nous avions alors du monde. Penser que nous aurions pu la
mener autrement est souvent une erreur et conduit à défaire, occulter,
détruire, ce que nous avons construit. Se remettre en question, ne signifie pas
qu’il faille tout rejeter de soi, de son passé. Comme on le fait lors de
certaines crises du milieu de vie dont l’état émotionnel, intense, empêche de
prendre du recul. Quand c’est le cas, il est préférable de ne pas prendre de
décisions hâtives, impulsives, mal préparées, radicales et irréversibles, de
temporiser et, si c’est possible, de se faire aider. Par exemple en se faisant
accompagner par un thérapeute expérimenté, bienveillant, en qui on a confiance.
Cette démarche permet notamment d’apprendre à mieux se connaître, à évaluer
précisément la situation et les possibilités qui s’offrent vraiment à nous; à
accompagner la crise au sein du couple, de la famille, le divorce. Bref à être
dans le concret.
On peut
faire des rêves un peu fous si on les prépare de manière raisonnable. Changer
sa vie, par petites touches, en travaillant sur soi, en modifiant certaines
choses dans le travail et dans ses activités familiales, peut suffire à apaiser
les émotions, à passer le cap.
Quel est le message
principal d’Hector dans ce livre?
Dans ce
dernier livre, les patients d’Hector, et Hector lui-même, incarnent
quelques-unes des facettes que peut prendre cette crise du milieu de vie, selon
les histoires et les personnalités de chacun. Leurs questionnements, leur
manière de la résoudre la crise, montrent que ce type de crise n’est ni une
maladie, ni un signe de faiblesse, ni un pêché, et qu’il est somme toute assez
banal d’éprouver un sentiment d’insatisfaction, de déception, de frustration,
de colère, par moment, vis-à-vis de son existence. Pour y faire, chaque
personnage va devoir rester à l’écoute de ce qu’il ressent, éprouve, trouver sa
propre voie vers le bonheur, et opter aussi souvent que possible pour des choix
raisonnables.
Evoluer
dans une partie de ses désirs et aspirations est inévitable au cours d’une vie.
Nous pouvons tous être concernés par ce type de crise, par la valse des
émotions qu’elle génère. Nous sommes rarement prêts à vivre ces transformations intérieures, y
compris un thérapeute comme Hector. Mais, quand nous en sortons, quand nous
avons terminé de la traverser, nous nous rendons parfois compte que cela
peut-être une formidable aventure à mener à deux ou en famille, et que les
possibilités sont infinies. Le message principal d’Hector est donc d’inviter le
lecteur, avec humour et tendresse, à dédramatiser, à relativiser, à être
tolérant lorsque ce type de crise survient. Quelle le concerne ou qu’elle
touche l’un de ses proches.
RETROUVEZ l'intégralité de cette rencontre avec François Lelord: www.lyoncapitale.fr/.../Crise-de-la-quarantaine-au-secours-je-suis-mortel
Belle route
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